Aujourd’hui, nous « fêtons » les cinq ans d’anniversaire de la sortie du volume 7 de Onmyôji – Celui qui parle aux démons. Il s’agit d’un manga de Reiko Okano édité par Delcourt (époque Akata) depuis mai 2007. Reiko Okano se base sur la série de romans de Baku Yumemakura, s’inspirant du personnage historique Abe No Seimei, célèbre onmyôji (maître du yin et du yang) ayant vécu à l’époque Heian (794-1185). Au Japon, le manga sort entre 1993 et 2005 au début dans le Comic Burger (magazine seinen de Gentosha), puis ensuite dans le Comic Birz (idem) et enfin dans le Melody (magazine josei de Hakusensha où on trouve The Top Secret et Le Pavillon des Hommes) à partir de 1998. C’est un manga culte au Japon qui connaît 13 volumes reliés. Si j’en parle dans cette rubrique, cela signifie bien une chose: le volume 8 n’est toujours pas sorti, et nous n’avons aucune nouvelle quant à l’avenir de la série en France (enfin, on se doute plus ou moins de cet avenir, inutile de faire appel à un… onmyôji!).

Onmyôji fut sûrement l’un de mes plus grands coups de cœur dans ma « carrière » de lectrice. Pourtant, au moment de sa sortie en 2007, même en ayant beaucoup aimé ma lecture, ce n’était pas encore le cas. C’est vraiment avec le temps, petit à petit, que j’ai fini par hisser ce manga parmi mes préférés. A ses débuts, je reconnais pourtant ne pas avoir soutenu le titre: j’étais encore dans une période naïve et je ne réalisais absolument pas qu’acheter un manga neuf était un acte de soutien. Ainsi, j’achetais la plupart de mes manga d’occasion (cela inclut des titres tels que les débuts de 7 Seeds, Le Cortège des cent démons, puis les débuts de Goyô). D’autant plus que dés sa sortie, Onmyôji coûtait la modique somme de 15€ pour un format identique à d’autres titres qui en coûtaient traditionnellement 10.
En réalité, je me suis surtout rabattue sur Onmyôji suite à l’arrêt du Cortège des cent démons. A cette époque, je limitais beaucoup plus mes achats et je n’avais droit qu’à un type de série en cours, la case yôkai était donc prise. J’ai commencé à acheter la série en neuf au volume 4 (ou 5?) seulement (la décennie passée, les manga d’occasion coûtaient bien moins chers et les grands formats étaient très souvent disponibles dés leur sortie… sûrement les fameux service presse). Et c’est aussi le moment où j’ai réalisé que Onmyôji était surtout un des manga préférés, un de ces manga que je remerciais le ciel de pouvoir lire en français, et surtout un de ces manga que je voulais tant lire un jour. C’est donc devenu l’un des titres les plus importants de ma collection.
A l’époque de la sortie du volume 5, je m’intéresse enfin aux histoires de vente. Et le bât blesse: certains manga cartonnent, d’autres peinent commercialement. Onmyôji fait évidemment partie du second groupe. Moins de 500 exemplaires (autour de 200? faut croire que le club est très très select, certain-e-s ont même plus d’amis Facebook…). Le tout sort de manière très sporadique, jusqu’au volume 7, mais la série est toujours en cours. Le sort est plus ou moins jeté lorsque Akata devient un éditeur indépendant en 2014, sans Dominique Véret pour défendre la série auprès de Delcourt.
Pourtant, j’y ai cru au volume 8, après avoir vu une chronique de celui-ci sur le site de Animeland, au cours de l’année 2015 (en mai de mémoire, la chronique n’ayant pas été sauvegardée par Wayback Machine). J’étais donc toute contente: le volume allait sortir dans les mois à venir. Mais quelle naïveté! Le chroniqueur a sûrement dû lire une version PDF, donc aucune garantie que la version papier ne sorte. Sur Manga News, on pouvait lire les news suivantes tout au long de l’année 2015: Onmyôji 8 pas avant 2015, Nouveau report du tome 8 d’Onmyôji, Le tome 8 d’Onmyôji repoussé à 2016. Depuis, pas de nouvelles. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir invoqué Jacques Pradel via son émission Perdu de vue, mais peut-être que je devrais plutôt essayer Témoin N°1…

Il est tout de même très regrettable de voir qu’un tel titre ne peut pas avoir une place dans un marché tel que le nôtre (on aime tant s’en vanter: le second marché mondial du manga est la France). Surtout que ce titre aurait pu avoir une exposition bien au-delà du cercle des fans de manga: j’aurais tellement aimé que la presse généraliste se penche dessus, comme elle s’est penchée sur Chiisakobé par exemple! Mais le titre est sans doute sorti un peu trop tôt, à un moment où il ne faisait pas encore si bon de parler manga ou de valider certains titres (je ne sais même plus quand Taniguchi est devenu « acceptable »). Peut-être que la communication n’était pas aussi développée qu’aujourd’hui. Mais avec les fréquentations de lieux tels que le Musée Guimet, la Maison de la Culture du Japon à Paris, avec les personnes qui achètent de la littérature japonaise aux éditions Picquier, il y avait un public du Japon érudit pour se pencher sur Onmyôji… Peut-être qu’à cette époque, les années 2000, ces deux mondes avaient encore du mal à se rencontrer (et sans doute encore aujourd’hui…).
Et pendant ce temps, je dois le dire, et je l’assume, j’ai du mal à lâcher le morceau: Abe no Seimei et Hiromasa me manquent cruellement. L’ironie de tout cela, malgré un personnage principal exerçant en tant que onmyôji très puissant, la malédiction a réussi à s’emparer de la série… De mon côté, je réfléchis de plus en plus à me procurer la série entière en édition taïwanaise, malgré les doublons (les volumes ne sont plus vendus à l’unité… reste le marché de l’occasion. C’est dommage surtout quand on sait que la suite sort là-bas!). Je souhaite bon courage à celles et ceux que la série intéresserait: le volume 6 surtout est devenu très très rare. Car malgré l’absence plus que probable d’une fin en français de notre vivant, Onmyôji vaut le coup d’être lu. Il y a bien un fil rouge dans cette série, mais les histoires peuvent aussi se lire de manière indépendante.
Quand j’ai su que le FIBD 2018 se consacrait à feu Tezuka, j’ai même espéré que son fils Macoto Tezuka vienne accompagné de sa femme: Reiko Okano! Les obsessions ont la vie dure… Malheureusement, tout laisse penser que Delcourt a baissé les bras. En effet, les relances sont sans réponse: ma dernière question posée sur le forum de Mangaverse concernait à la fois RiN de Harold Sakuishi et Onmyôji, ce dernier a juste été ignoré alors qu’une réponse a été apporté pour le premier. A partir de là, j’aimerais bien que Delcourt finisse par rompre le silence en apportant une réponse, quelle qu’elle soit. Afin que tout le monde puisse passer à quelque chose en digérant la nouvelle chacun-e à sa manière, au lieu de se raccrocher à un espoir aussi mince soit-il (idem pour Panini et ses multiples séries dans le coma, spéciale dédicace à Princesse Kaguya – notons que les deux mangaka s’appellent… Reiko et officient chez le même éditeur et le même magazine aujourd’hui, ça doit signifier quelque chose ou bien je suis complotiste). D’autant plus qu’au vu du nombre de lecteurs et lectrices, cela fera autant de bruit qu’une manifestation de chats coussin…
Pour conclure, la suite Onmyôji – Tamatebako a débuté en 2010 dans le Melody (pour changer). Même cette série s’est terminée avec son septième volume (été 2017).
EDIT (17/03/2018): à propos de ma question sur Onmyôji volume 8, j’ai finalement eu une réponse sur le forum de Mangaverse. Bref, c’est donc hyper frustrant: cela signifie que depuis mai 2015 au moins (date de la chronique perdue sur Animeland), le volume 8 est dans un état végétatif…