Vincent Machot vit dans une petite ville de province. Sa vie est confortable mais sans éclat. Il a 30 ans et occupe un appartement en-dessous de celui de sa mère, vieille veuve de 70 ans qui lui fait régulièrement du chantage affectif. Malheureusement pour lui, il est fils unique. Il a repris le salon de coiffure de son père, et sa vie sentimentale semble être dans l’impasse, avec sa Marianne qui est partie pour Paris et sûrement pour un autre. Son meilleur ami est son cousin Laurent qu’il voit presque tous les jours. Sa vie change lorsque Rosalie Blum entre en scène, alors qu’il se rend à une épicerie dans un quartier qu’il fréquente peu. Dés lors, il est troublé et se met à s’intéresser de très près à cette femme, pas particulièrement jolie et bien plus vieille que lui.
Rosalie Blum est une série complète en 3 volumes, écrite et dessinée par Camille Jourdy et éditée par Actes Sud. Alors que le titre de la série porte un nom de femme, j’ai été surprise de voir en héros un homme de 30 ans. Le premier volet, Une impression de déjà-vu, est très prenant. Camille Jourdy y croque la vie banale dans une petite ville de province, petite vie plutôt tranquille et confortable, très régulière mais sans aventure. Le personnage de Vincent est coincé, il a 30 ans, sa vie amoureuse semble mal partie, il vit sa vie de manière passive, sans rien entreprendre pour changer les choses et surtout, le poids de sa mère est écrasant, n’ayant pas su dire « stop » à celle-ci. Pourtant, il semble vouloir vivre autrement, mais n’a pas trouvé de solution, alors il reste par défaut, dans son petit confort. Décrite ainsi, cette situation est finalement celle de beaucoup de personnes, avec plus ou moins de confort. L’avantage de Vincent, c’est de pouvoir vivre tranquillement, même ennuyeusement, car son travail ne lui absorbe pas tout son temps, il est indépendant et non soumis à une certaine dose de stress. Malgré tout, cela ne suffit pas (pourtant, il a un chat!!!).
Et ainsi intervient Rosalie Blum, une femme, dont la vie intrigue profondément Vincent. Celle-ci semble aussi solitaire que lui, et il aimerait s’en rapprocher. Mais il est beaucoup trop timide. D’ailleurs, son meilleur ami et cousin Laurent lui reproche souvent d’être trop « gentil », ce qu’il faut éviter dans notre société pour plaire à la gente féminine. Rosalie Blum est une personne mystérieuse, car elle sort tous les soirs, en solitaire, boit beaucoup d’alcool, et aime les promenades, les longues promenades. De tout le volume, on la suivra de loin par les yeux de Vincent, sans en savoir beaucoup plus. Lorsqu’on observe bien, tous les personnages sont finalement esseulés: Vincent, Rosalie, mais aussi la mère de Vincent, veuve assez folle qui passe son temps à casser toutes les femmes qui ont osé sortir avec sa progéniture, et qui vit par procuration au moyen de figurines avec lesquelles elle reproduit certains évènements entendus à la télévision ou à la radio.
Dit comme ça, on ne dirait pas, mais le ton de Camille Jourdy est extrêmement cocasse. Les personnages, avec leurs particularités, sont sacrément timbrés et méritent le détour, surtout la mère de Vincent, dotée d’un caractère désagréable et excentrique, ou encore le cousin Laurent et ses trois maîtresses. Les dessins tout en rondeur de Camille Jourdy sont plein de charmes, mais surtout, les couleurs douces, au tein pastel sont particulièrement agréables à l’oeil. La narration de ce premier volet se fait très introspective, au moyen de textes reflétant les pensées de Vincent. La mise en page constitue un savant mélange d’illustrations en pleine page, de moments introspectifs avec un dessin et des pensées au-dessus, puis des moments de dialogues qui évoquent les bd blogs, avec du texte sans phylactère fermé, et des personnages disséminés un peu partout sur la page, sans cases fermées, ou encore une mise en page plus tarditionnelle, sans case comme toujours, mais avec un contour doux, formé par le décor. Le tout donne quelque chose de très vivant. L’écriture à la main, en attaché, contribue à l’ambiance chaleureuse de l’ouvrage, tout en rondeur, comme le dessin de Camille Jourdy. Quelque part, la lecture de ce Rosalie Blum m’a évoqué Tamara Drewe. La fin du volume donne incroyablement envie de lire le suivant!
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