L’année manga 2012 fut particulièrement marquée par la venue en France d’une grande auteure de shôjo qu’on n’a jamais eu la chance de lire en français: Moto Hagio. Moto Hagio, née en 1949, fait partie des grandes actrices (aux côtés de Keiko Takemiya) de la révolution shôjo qui s’opère dans les années 60-70, à tel point que les critiques donnèrent un nom à ce groupe de shôjo mangaka toutes nées autour de 1949: le groupe de l’an 24. Elles sont les pionnières de ce qui constitue aujourd’hui le boys love.
Le dimanche 4 mars 2012, lors de l’événement Planète Manga au Centre Pompidou, une conférence est organisée dans la Petite Salle . Moto Hagio sortait alors d’un atelier du Studio 13/16 dans lequel des enfants devaient, après une traduction des 10 premières pages de son célèbre manga Ils étaient onze!, s’inspirer de l’histoire pour en faire une couverture. Moto Hagio était alors accompagnée Hiroko Uchiyama, professeur à l’université féminine Joshibi et c’est elle qui mena la conférence.
L’édition 2012 du Salon du Livre qui se déroule du 23 au 26 mars fait du Japon son invité d’honneur. De ce fait, des mangaka telles que Moto Hagio ou Mari Yamazaki (Thermae Romae) font partie des personnalités invitées à s’exprimer autour de conférences ou tables rondes. Le vendredi 23, Moto Hagio et Jean-Claude Mézières (Valérian et Laureline) donnent une conférence croisée dont le thème est la science fiction. Je n’ai malheureusement pu participer à cette conférence. Le samedi 24 mars, conférence de Moto Hagio animée par Olivier Fallaix (Animeland) sur la Grande Scène qui présente l’auteure, son oeuvre et son importance dans l’Histoire du manga (et du shôjo en particulier). Petite anecdote, il y avait une certaine fangirl assise à côté de moi pendant la conférence: Junko Kawakami (It’s your world! chez Kana), une mangaka qui vit à Paris. Séance de dédicace tout de suite après (et je m’en mords encore les doigts aujourd’hui car j’ai oublié mon exemplaire de A Drunken Dream and Other Stories chez moi): file pas très longue, omniprésence japonaise (vu qu’aucun manga n’est sorti en France). A ce sujet, je trouve regrettable que Gibert Joseph n’ait pas fait l’effort de vendre l’anthologie A Drunken Dream and Other Stories sorti chez Fantagraphics (donc en anglais), seuls les manga de Moto Hagio en japonais étant présents sur le stand. En fin d’après-midi, elle participe à une table ronde sur « le manga au féminin » organisée par le Magazine Littéraire en compagnie de Mari Yamazaki (Thermae Romae), autre fangirl de Moto Hagio.
En avril, on apprend via les sites de news manga que la médaille d’honneur a été remise à Moto Hagio.
Moto Hagio est également prévue comme invitée à la Japan Expo pour juillet où elle donnera une conférence et vendra un doujin.
Peu après, lors d’une interview Kaze Manga donnée par Manga Sanctuary, on apprend qu’un titre de la mangaka est prévu dans leur catalogue. Je me demande vraiment lequel, et même si c’est son oeuvre phare, je croise les doigts que ce ne soit pas Thomas no shinzô (l’ancêtre du boys love), prévu chez Fantagraphics (Etats-Unis) pour août de cette année. J’attends la Japan Expo pour peut-être une annonce de la série en question, et je croise les doigts pour Marginal, Barbara Ikai ou They Were Eleven!, des séries SF puisqu’elle est surtout connue pour ça.
Il me tarde de lire ses oeuvres en français. Il est cependant toujours possible d’en lire en anglais, en particulier l’anthologie A Drunken Dream and Other Stories qui donne un aperçu de son travail et qui est disponible sur tous les sites de vente en ligne. J’y reviendrai sans doute dans un autre article, mais le rapport qualité/prix est plus que correct surtout vu l’édition luxueuse de Fantagraphics, et la traduction assurée par un de ses plus grands fans: Matt Thorn. En août, il sera possible de lire The Heart Of Thomas dans une version intégrale et luxueuse en un seul volume, avec toujours Matt Thorn à la traduction et chez le même éditeur.
Par le passé, d’autres oeuvres sont sorties aux Etats-Unis (milieu des années 90) chez Viz Media, avec toujours Matt Thorn à la traduction. A, A’ est trouvable mais le prix est onéreux surtout pour l’édition très simpliste et une lecture de gauche à droite. J’ai tout de même réussi à avoir un exemplaire en état « acceptable » pour 4$ et pour cause, c’était un exemplaire de bibliothèque (13€ en comptant les frais de port), mais c’est toujours ça de pris. Par contre, une de ses oeuvres majeures, They Were Eleven!, est bien plus rare. Ce récit est sorti dans l’anthologie Four Shojo Stories aux côtés de 3 autres récits (qui ne brillent apparemment pas autant) qu’on trouve aux environs de 100$ sur amazon.com. L’autre moyen réside encore dans les fascicules au format comics mais c’est difficile en France (on en trouve à des sommes dérisoires dans les bacs à comics aux Etats-Unis par contre). Ce récit est sorti sous 4 numéros. J’ai tenté une commande chez Milehighcomics qui n’a pas prélevé mon compte mais qui n’a jamais donné signe de vie. Dommage.
Toujours est il que Moto Hagio, considérée comme une auteure majeure du shôjo au Japon, n’est finalement que peu connue en Occident. J’ai moi-même manqué de curiosité jusque-là, la génération de l’An 24 m’évoquant plutôt La rose de Versailles, et il faut dire que l’univers de Riyoko Ikeda ne trouve pas écho en moi. C’est surtout par l’ouvrage A Drunken Dream and Other Stories, en particulier l’interview qu’on y trouve à l’intérieur, menée par Matt Thorn, que j’ai découvert une mangaka dont l’univers me fascine: du shôjo et de la SF. Car la dame est fan, depuis son adolescence, d’auteurs tels que Isaac Asimov ou Ray Bradbury. C’est ensuite à Pompidou, lors de sa conférence, que j’ai vu les planches de They Were Eleven!, Star Red, Silver Triangle ou encore Marginal qui m’ont fait découvrir une fabuleuse artiste. Et après lecture, je peux dire qu’une mangaka que j’aime beaucoup aujourd’hui, Reiko Shimizu (The Top Secret, Princesse Kaguya), est clairement une héritière de Moto Hagio. On peut en dire de même pour Saki Hiwatari (Please Save My Earth). Graphiquement, le trait de Fuyumi Soryo (Mars, ES Eternal Sabbath) m’évoque pas mal celui de Moto Hagio à partir des années 80 (Marginal, mais surtout son oeuvre la plus longue A Cruel God Reigns).
Enfin, pour ceux qui voudraient lire un compte rendu de sa conférence du 4 mars au Centre Pompidou, rédigé par Paoru: http://www.animint.com/blog/000495-planete-manga-conference-moto-hagio.html
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